30 décembre 2014

Vous êtes bien urbain

Chers aventuriers du vocabulaire perdu, je vous avoue que s'il existe un terme aujourd'hui banalement détourné qui m'écorche régulièrement les oreilles, c'est bien l'adjectif "urbain", abusivement utilisé à tour de mauvaises langues.
Musique urbaine, marque urbaine, violence urbaine...
Bien loin de ses diverses significations originelles (liées principalement à l'urbanisme, voire à la politesse), le mot "urbain" désigne en effet dorénavant tout ce qui fleure bon l'inculture, la bêtise, le mépris, la brutalité, ainsi que le communautarisme si injustement stigmatisé par une vilaine population apparemment trop attachée à ses valeurs humaines et culturelles.
Comprenez bien, chers disciples égarés de Jacques Capelovici, que même s'il est parfois avisé d'accepter quelque évolution du langage au fil des siècles, un tel châtiment étymologique s'avère tout de même plutôt excessif, bien qu'étant hélas en phase avec une époque où toute notation sera bientôt définitivement bannie des établissements scolaires. 
Bref, à défaut de devenir les paysagistes utiles d'un environnement socio-culturel en friche, vous pourrez toujours revêtir salutairement la panoplie de néo-urbaniste, en diffusant sur les ondes ou votre poitrine de somptueux messages principalement agressifs et sexistes, rédigés en dialecte improbable. C'est aussi cela, l'évolution. 
En attendant, vous pouvez me croire : malgré ma profonde aversion pour toute végétation abusive, je m'en vais rapidement rejoindre le monde rural.
Et ce ne sera pas une légende urbaine, pour une fois. 

27 décembre 2014

Magie noire de Noël

Chers compatriotes égoïstement attachés à ces odieuses fêtes de fin d'année au détriment des magnifiques cultures nouvellement imposées, c'est avec un plaisir non enrubanné que je vous annonce l'humble renaissance de ma modeste étable bretonne, étant plus que jamais copieusement entouré de bovins et d'ânes, et ce déjà bien en amont de la prochaine édition du Salon rennais des productions animales.
Oui, chers santons égarés, sachez que je suis particulièrement fier - du fond de ma crèche politiquement incorrecte - d'avoir une fois encore pu résister aux assauts acharnés de ces dangereuses et insolentes fêtes saturnales.
Cette résurrection n'était pourtant pas gagnée d'avance. Etant a priori doté d'une nature aventurière (voire provocatrice), je reconnais avoir récemment pris certains risques, ayant dans un premier temps eu l'idée saugrenue de faire quelques courses basiques un 24 décembre en territoire autant insupportable que musulman, où les seuls ballots encapuchonnés rencontrés aux abords des vitrines affichaient ouvertement d'autres objectifs que ceux des généreux donateurs en habit rouge se déplaçant habituellement en traîneau, et non en bolide de marque allemande.
La seconde erreur - et non des moindres - fut d'avoir choisi un certain accompagnement audiovisuel durant cette époque de profond égarement social. En effet, bien qu'étant habitué à la pauvreté télévisuelle omniprésente en cette récurrente période d'abstinence intellectuelle, je reconnais avoir été quelque peu perturbé par les propos de la sacro-sainte Voix journalistique bêlant à heures régulières. Quand, juste après nous avoir fait larmoyer pendant quelques jours sur les notions - parfois rassurantes - de précarité, de crise, et de croissance exponentielle du chômage, l'on nous a expliqué en toute impunité, dès le 26 décembre, que la préoccupation principale des Français était d'accommoder les restes de poularde et de foie gras, j'en suis resté autant bouche bée qu'estomac affamé.
J'ose donc espérer qu'il ne s'agissait que d'une simple erreur d'interprétation, mais me prépare toutefois à affronter en votre compagnie un nouvel incontournable lot de "bovâneries" pour ces tous derniers jours d'une année déjà bien morose.
Ou noire ; c'est selon.